vendredi 2 mai 2008

Juliette

Ça faisait un moment qu'on n'avait vu Juliette. Pour l'instant, pas de cannibales en vue : elle profite de la fin des grandes vacances.

Bon, la rentrée arrive, elle va pouvoir retrouver ses copines.

Chapitre trois

Trop courts, ces trois jours à Gruissan : entre la plage, le Zodiac de Papa et la pêche sur les rochers du port, il aurait fallu qu'on reste au moins trois semaines.

Trois mois, c’aurait été bien aussi.

Heureusement, l'école commençait le Jeudi qui suivait notre retour, et on n'a pas eu le temps de s'ennuyer à la maison, même si Mélanie et Marinette n'étaient pas là, et si Valérie ne pouvait pas sortir parce que sa maman voulait qu'elle travaille avant la rentrée.

C'est vraiment une manie de grandes personnes, ce truc là... Hé, ça sert à quoi, les vacances ? Est ce que la maman de Valérie emporte du courrier à trier quand elle va à Palavas passer une semaine ?

On dirait que les adultes n'ont qu'une envie, c'est de nous faire travailler le plus possible... c'est vrai que pendant ce temps là, on leur fiche la paix !

Enfin, le jeudi est arrivé... quand je dis enfin, j'exagère un peu : il a suffi d'une nuit après notre retour.

Maman a emmené Clément (Casse-pieds) à la maternelle, même si c'est juste en dessous de chez nous, et moi, je suis allée à mon école.

Mélanie était toute seule le long d'un mur, mais j'ai préféré aller vers le groupe où j'apercevais Valérie et Sonia.

Sonia n'est pas vraiment ma meilleure copine : elle est toujours trop sûre d'elle, et toujours à se moquer des vêtements des autres si ce n'est pas des marques.

Malgré ça, il faut bien avouer que Sonia a souvent des choses intéressantes à raconter ; et là, justement, elle était en train de dire que la maman d'un de nos camarades avait disparu deux jours avant la rentrée !

- La maman de qui ? j'ai demandé.

- Celle de Teddy, tu sais, celui qui a toujours des fripes du Secours Populaire.

Je voyais bien qui était Teddy, et Sonia n'avait vraiment pas besoin d'en rajouter sur ses vêtements. Facile, pour elle, avec sa salopette Chichi !

- Et il est là, Teddy ?

- Oui, me répondit Valérie, il est dans le bureau de la directrice, avec son père... mais je crois qu'il ne va pas rester dans cette école.

Teddy et ses parents vivaient dans une toute petite maison, dans une ruelle du vieux village. C'est vrai qu'on avait l'impression qu'ils ne roulaient pas sur l'or.

En classe, l'année d'avant, la place à côté de Teddy était libre : personne ne voulait être assis à cet endroit.

Je dois avouer que moi, je n'en avais pas très envie non plus : je trouve que Teddy pue !

Maman dit que ce n'est pas de sa faute... Bon, je veux bien, mais alors moi je dis que ce n'est pas de la mienne non plus ! Ça me semble être une raison suffisante pour ne pas avoir à supporter son parfum de putois écrasé, non ?

Mais quand même, ça me faisait drôle de penser que cette année, aucun d'entre nous ne serait assis à côté de Teddy. Même si c’était plus reposant pour nos narines, il allait nous manquer, Teddy, avec son air d’être tout le temps dans la lune et ses réponses à côté de la plaque quand le maître posait une question.

- Et il va partir où ?

- J'ai entendu dire qu'il avait de la famille à Marseille. Il va sûrement aller là bas.

- Et sa maman? On sait où elle est allée ?

- J'ai vu des gendarmes dans leur rue, dit Sonia, (qui a toujours tout vu) ils doivent la chercher.

- Et tu crois qu'ils la cherchent devant chez elle ? (C'est idiot, mais j'ai parfois du mal à m'empêcher de rembarrer Sonia !)

- Bien sûr que non! me répondit-elle d'un air pincé, ils étaient en train de chercher des indices, des trucs à faire renifler aux chiens ou quelque chose comme ça.

- Ils avaient des chiens ?

- Ben non, mais...

- Alors ils ont dû les renifler eux-mêmes, intervint Louis qui avait suivi toute la conversation, pas besoin de chiens !

Et il éclata de rire, imité par Mathieu Chêne et Kevin Bonniol, qui n'avaient rien suivi du tout, puisqu'ils venaient d'arriver, mais du moment que Louis riait, ça leur paraissait drôle.

Teddy n'est pas venu en classe ce matin là, ni les jours suivants. Il était bel et bien parti, à Marseille ou ailleurs, et on n'a plus eu de nouvelles.

Les gens du village ont parlé de la disparition pendant quelques jours. Chacun avait son avis : elle était partie à Toulouse dans une secte, à Frontignan avec des gitans, ou en Ardèche dans une communauté insectivore ! Toutes ces informations étaient annoncées comme des certitudes aussi incontestables que la somme de deux plus deux. Je ne vous dis pas combien ça fait, deux plus deux, je vous laisse chercher vous-mêmes.

Au bout de dix jours, on l'avait oubliée, comme on avait oublié Teddy. Louis et ses copains n'ont même pas dit un mot sur le savon de Marseille, pourtant…

Un Samedi, avec Valérie, on a décidé d'aller voir si Mélanie pouvait venir jouer avec nous. Armelle nous a dit que c'était trop dangereux de faire du vélo dans la campagne, mais qu'on pouvait venir jouer avec Mélanie et Marinette si on voulait.

Dangereux, les chemins autour du village ! C'était bien la première fois que j'entendais un truc pareil, mais on est quand même allées jouer avec Méla et Nénette, comme elles s'appellent entre elles.

Dans la chambre de Mélanie, je lui ai demandé :

- Dis donc, elle est drôlement inquiète, ta maman! Elle ne vous laisse jamais sortir ?

- Pas tellement, ici... elle dit qu'à Rivebonne, ça allait, mais qu'ici, il y a trop de voitures ; et puis la maman de Teddy, c'est bizarre, comme elle a disparu.

- Elle pense qu'elle a été enlevée ?

- Je ne sais pas... nous, on ne la connaissait pas. Curieux, la façon qu'elle a eu de dire ça ! On aurait dit qu'elle avait l'air gênée. Je suis sûre que Valérie n'a rien remarqué... pas la peine que je lui en reparle.

On n'a plus trop eu le temps de penser à tout ça pendant le reste de l'après-midi : Mélanie et Marinette avaient des jeux super. J'ai bien aimé la poule sous laquelle il fallait passer sans la toucher, sinon elle se mettait à chanter comme une débile. On passait dessous à genoux, à quatre pattes, accroupies, et de toutes les façons possibles selon ce que les dés nous disaient de faire.

J'aurais bien demandé ça pour Noël, mais j'étais sûre que Maman me trouverait trop grande pour ce jeu de bébé... à moins de leur dire de l'offrir à Clément.

A cinq heures, on a eu des jus de fruits, mais ils étaient trop froids, cette fois... je préférais ceux de l'autre jour ! J’ai mis le mien sur un radiateur en espérant qu’il se réchaufferait, mais comme le chauffage était arrêté, ça n’a pas très bien marché.

Pendant ce temps, les parents de Méla et Nénette ont pris le thé avec Madame Joyeux, une dame qui habite au village, mais qui travaille à Montpellier. Ils parlaient de trucs indiens. Pas les indiens avec des plumes qu’on voit dans les westerns : les indiens d’Inde, le genre de barbus en slip qui s’assoient en tailleur sur des planches à clous et qui jouent de la flûte pour faire danser des serpents.

Ça avait l’air de tous les passionner !

Madame Joyeux, c'est la tante d'un garçon qui est au C.E.l, mais je ne sais plus comment il s'appelle. Ça n'a pas vraiment d'importance, c'est un petit.

Cette pauvre Madame Joyeux, je ne sais pas si elle était mariée à un nain qui s'est sauvé avec Blanche Neige, mais elle a l'air tout ce qu'on veut, sauf joyeuse, même quand elle dit qu’elle s’amuse !

Autant Armelle a l'air rigolote, autant Madame Joyeux semble toujours prête à fondre en larmes. En plus, elle est toujours habillée pareil, avec un vieux jean râpé et un gros pull sans couleur.

Maman dit qu'elle doit boire, ou se droguer... je crois qu'elle me fait un peu peur, mais surtout de la peine, enfin je ne sais pas trop.

Monsieur Charumain (son prénom, c'est Gérard, mais comme c'est un maître, je l'appelle Monsieur Charumain­), c'est quelqu'un qui a toujours l'air sérieux, mais qui dit plein de choses pour faire rire les gens. Maman appelle ça un « pince sans rire ».

Il parait qu'en classe, il est pareil : ses élèves l'aiment bien, même si ça ne fait que quelques jours qu’ils l’ont comme maître.

Monsieur Lapatte, il est moins drôle... c'est le moins qu'on puisse dire !


On connait tous des "Monsieur Lapatte". Un brave homme au demeurant, mais sans doute pas bien rigolo pour les élèves...
http://www.lulu.com/content/2281715

jeanlouis.jabale@club-internet.fr

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